Lady Phyll: Vous avez effectué un travail incroyable. Quelle a été l'étincelle à l'origine de la Trans+ Pride ?
LUCIA: Pour moi, les quelques premières années de transition ont été vraiment difficiles. Je me sentais plus bas que terre, je me sentais toujours si seule. Je ne connaissais pas vraiment beaucoup d'autres personnes trans. Et je n'en ai jamais vraiment parlé après, mais c'était une époque sombre pour moi. J'avais très souvent des pensées suicidaires. Je m'asseyais juste dans ma chambre pour me maquiller, je mettais des vêtements de femme, puis j’enlevais tout et je retournais me coucher. J'ai déménagé à Londres peu après, et au bout de quelques temps, j'ai commencé à me faire des amis trans. Et quand je croisais des gens qui pensaient à faire leur transition, je n'arrêtais pas de me dire que je ne voulais pas qu'ils traversent ce que j'ai traversé pendant ma transition. Je n'arrêtais pas de me dire que je ne voulais pas que les gens qui explorent leur identité aient l'impression qu'il n'y a personne comme eux, qu'ils n'ont personne sur qui se reposer.Je me suis demandé comment réunir autant de personnes trans que possible pour prouver qu'on n'était pas seul·e·s.
LADY PHYLL: Malheureusement, je crois que les gens n'ont pas souvent l'occasion de partager leurs expériences, de dire qu'ils se sont sentis isolés et seuls. Pensez-vous que la communauté LGBT+ accepte les personnes trans ?
LUCIA: Je dirais que les communautés queer acceptent les personnes trans. Mais les communautés gay plus « traditionnelles » ont vraiment abandonné les personnes trans. Si l'on prend RuPaul's Drag Race par exemple, qui est une forme commerciale du drag, combien de femmes ouvertement trans y ont participé ? Dans le vrai monde du drag, les drag queens trans sont en majorité. C'est super que RuPaul ait introduit l'univers du drag à un plus grand public, mais ça a complètement effacé les femmes trans, et personne n'a rien dit. On fait face à des groupes qui nous détestent et qui sont tenus par des personnes lesbiennes, gay ou bisexuelles. Il est temps que le reste de la communauté LGBT se souvienne de ce que veut dire le T. C'est une question de solidarité ; on est plus forts ensemble. On aurait jamais eu un mouvement de libération gay s'il n'y avait pas eu d'unité au départ. On a besoin de cette unité maintenant.